Le chalet, ça va ou bien ?
Résident à Neuilly, les hasards de la vie n’ont mis aucun nécessiteux sur mon chemin, ce qui ne m’empêche nullement d’être sensible à leurs conditions de vie et de me mettre à leur place. Aussi ai-je décidé de passer une nuit dans une cabane pour expérimenter in-situ ce que vivent nombre de pauvres au quotidien. J’ai demandé à mon personnel de se rendre dans un Bricofourbi, une enseigne de bricolage et matériaux de construction, pour me ramener une cabane en kit.
« Vous voulez une cabane de jardin toute simple ? » m’ont-ils demandé.
— Quand même pas. Trouvez plutôt un chalet, comme ceux du catalogue, là. Tout de même plus en harmonie avec ma demeure. Un 16 ou 18m2. Avec isolation, tant qu’à faire. Tenez… celui-ci irait très bien avec les ballustres du balcon. Notez la référence.
Deux heures plus tard ils étaient de retour, déconfits.
— C’est quoi ces planches ? Que voulez-vous que j’en fasse ? Et le chalet ?
— C’est tout ce qu’on a pu ramener, monsieur, et encore il a fallu qu’on discute dur. Les bulldozers ont tout fichu en l’air et les CRS bloquaient le parking. «Loi OPPSI-2 » ils ont dit au gérant du Bricofourbi. Pas content, le gars.
Et le tipi, ça va-t-y ?
— Services préfectoraux. Le jardin, c’est votre jardin ?
— Jusqu’à preuve du contraire, oui.
— Z’êtes propriétaire ?
— Ma foi, oui.
— Et la tente d’indiens plantée au milieu, c’est à vous ?
— Si vous parlez du tipi, oui. Cadeau de Noël pour les gamins. Depuis le temps qu’ils en rêvaient. Vous savez ce que c’est… Quand même 4 heures pour le monter. Pas si facile que ça, entre parenthèses…
— Facile ou pas facile, z’êtes en infraction.
— ?
— Nul n’étant censé ignorer la loi, z’avez une heure pour nous démonter ça.
— Vous plaisantez ou quoi ? Puis quelle loi, d’abord ?
– OPPSI-2. Faites pas comme si vous n’étiez pas au courant. Dans une heure on revient, et si cette foutue tente est encore là, on fait procéder à sa destruction à votre charge. Plus procès verbal. Z’êtes prévenu.